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Table Ronde autour du thème ''Droit et Photographie en Tunisie''

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lundi 11 juillet 2011


C'est dans un contexte de brûlante actualité (et de méteo) que s'est tenue le samedi 09 Juillet une table ronde autour du thème: ''Droit et Photographie en Tunisie'', dans le cadre de l'exposition ''jusqu'au bout''.
Le débat a été animé par la juriste en propriété intellectuelle Emna Lajnef. De par son avis éclairé et objectif (elle est elle même photographe) il a été permis de dresser un bilan général de la situation des droits de la photographie et de la propriété intellectuelle en Tunisie. Qu'en est-il alors concrètement?

Ce qu'il faut savoir avant tout c'est que le terme propriété intellectuelle couvre un éventail assez large et se divise en deux sous catégories:

1- Le droit d'auteur:
il comprend les oeuvres littéraires et artistiques (roman, poèmes, pièces de théâtre, ouvrages de référence, films compositions musicales, Photographies) ainsi que les créations architecturales (chose que je ne savais pas!).

2- la propriété industrielle:
Qui couvre les Logos, les marques, les inventions (brevets), les dessins et modèles industriels...

D'emblée, le constat est morose: En Tunisie, les textes protégeant le droit d'auteur sont presque inexistants ou très peu suffisants par rapport à ceux régissant la propriété industrielle. Pourquoi? Tout simplement parce que ce n'est pas rentable et que ça ne rapporte pas d'argent. Ce n'est pas très étonnant lorsqu'on sait la place accordée à la culture sous ses différentes formes sous l'ancien régime. Alors la photographie vous pensez bien...

Ce qui existe:

Il y a tout un arsenal de lois, de références juridiques et de traités internationaux, ratifiés par la Tunisie et qui régissent de près ou de loin le droit d'auteur dans notre pays. Peut être la plus ancienne et la plus connue étant la convention de Berne pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques de 1886. Elle n'est pas la seule, en voici une liste exhaustive:

- La Convention de l’UNESCO pour le droit d’auteur de 1952.
- La Convention arabe de protection des droits d’auteur.
- La Convention générale des tarifs et du commerce (annexe 1c – Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce) .

Pour ce qui est des lois tunisiennes:

1_ Loi n° 94-36 du 24 février 1994, relative à la propriété littéraire et artistique, publiée au JORT n° 17 en date du 01 mars 1994.

2_ Loi n° 2009-33 du 23 juin 2009, modifiant et complétant la loi n° 94-36 du 24 février 1994, relative à la propriétaire Littéraire et artistique
3_ Décret n° 96-2230 du 11 novembre 1996, fixant l’organisation administrative et financière de l’Organisme Tunisien de Protection des Droits d’Auteurs – OTPDA – et ses modalités de fonctionnement, publié au JORT n° 94 en date du 22 novembre 1996.

D'une façon générale, ces lois et textes s'accordent à dire une seule chose: Dès lors qu'une personne crée une oeuvre, quelle quelle soit, cette personne (nommée Auteur, créateur ou auteur du droit) est le propriétaire de cette oeuvre et décide et contrôle son avenir. En vertu de ces lois, cette oeuvre est protégée par droit d'auteurs dès sa naissance, et aucune formalité d'enregistrement ou de dépôt n'est requise pour lui assurer cette protection.

Vous me direz, c'est super tout ça, alors tout va bien dans le meilleur des mondes et aucun problème ne risque de se poser!! Malheureusement ce n'est pas si simple et le monde numérique ou l'ont vit n'est pas aussi aimant et naïf que celui des Bisounours. Personne ne va se gêner pour te piquer ce qui lui plait, de façon abusive ou même sans penser à mal. Alors ou est le problème exactement?

Et bien tout est question de preuve de paternité. Il faut être en mesure de prouver à tout moment que l'oeuvre est bien à nous, si possible en présentant un certificat quelconque avec nom prénom et ''date de naissance''. En clair, déposer l'oeuvre.

En Tunisie, il existe depuis 1997 un organisme non administratif qui a pour but la gestion collective du droit d'auteur, il s'agit de l' O.T.P.D.A (Organisme Tunisien de Protection du Droit d'Auteur). Cet organisme offre à ses adhérents tous les avantages de la gestion collective, tous les moyens dont il dispose pour garantir leurs intérêts et leur défense en cas de litige. Dans ce cas là, l'auteur ne s'embarrasse plus de formalité lourdes, cet organisme s'en charge pour lui.
Vous trouverez sur ce lien toutes les informations nécessaires sur cet organisme ainsi que les modalités d'adhésion.

Et si j'ai pas envie de me prendre la tête avec des organismes? je fais quoi?

Rappelez-vous que le tout est une question de preuve de paternité. Si vous voulez opter pour le système D, il existe diverses solutions pour ce faire. A titre d'exemple, dans le cas de mes nouvelles de fiction, je n'avais pas assez d'informations sur ce qu'il fallait faire et ou les déposer. On m'a alors suggéré l'astuce de la lettre recommandée: J'ai mis chacune de mes nouvelles dans une enveloppe scellée et je me les suis envoyé moi-même recommandés sans les ouvrir. Ainsi en cas de pépin, j'ai en ma possession une enveloppe avec le cachet de la poste faisant foi qui atteste ma propriété.
Pour ce qui est des photographies (le cas qui nous intéresse donc), une solution toute simple a été proposée dans ce contexte, celui de publier ces photos sur un blog ou un site. Ainsi une identité numérique serait crée et ferait foi en cas de litige. (Une bonne idée qui permettrait aussi d'inciter les gens à avoir leur propre blog, héhé!).

Le cas de Facebook (et des réseaux sociaux en général) a été évoqué. Certains collègues ont ainsi déclaré qu'ils ne publieraient plus de photos sur leurs profils (suis mon regard, Siwar). Je ne suis pas tout a fait d'accord avec cette rupture, les réseau sociaux ont au moins un avantage ''publicitaire'' que je ne nie pas. Les photos ne sont elles pas faites pour être montrées?
Je suis toutefois certain qu'il faut prendre toutes les précautions nécessaires pour parer à toute éventualité. Cela commence par un réflexe tout simple qui est de signer sa photo automatiquement. De préférence avec un nom et un prénom complets et une date si possible (suis mon regard, Siwar). Ce que je fais personnellement c'est d'incruster mon nom et prénom au sein même de la photo, de façon discrète certes, mais d'une manière à ce qu'elle ne puisse pas être supprimée par un crop, sans détruire l'image. Il y en a qui disent que je fais ça pour me la pêter, mais ce n'est pas le cas: c'est une A.S.S.U.R.A.N.C.E. Il y en a aussi qui disent qu'ils n'aiment pas signer leurs photos parce que justement elle les dénature. Je ne peux être d'accord, surtout de nos jours. Avec l'avancée des logiciels de retouche il est tout à fait possible de faire des signatures tout à fait discrètes et personnalisables à volonté, sans pour autant tomber dans l'excès du Watermark.

Voilà pour ce qui est de la protection de la propriété artistique, en attendant que le grand chantier juridique qui s'amorce en tunisien prenne en compte ces lacunes et édicte des lois et des décrets plus explicites pour protéger nos oeuvres.

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sources, lectutres et liens utiles:

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Mise à jour:

Suite à la publication de ce post, notre amie Emna Lajnef a eu la gentillesse de ma faire part de certaines remarques à propose de confusions de ma part et d'erreurs qui se sont glissées dans cet article. Elle m'a autorisé à le publier intégralement, ce que je m'empresse de faire ici en la remerciant encore pour sa célérité:

  • Bonjour

    Ma présentation à été longue et je n’ai pas le don d’oratrice. Je crains que cela à causé quelques confusion dans la galerie. Donc je recapitule :

    1ère précisions : ce ne sont pas les textes juridiques mais les juristes et les conseils spécialistes en propriété littéraire et artistiques qui sont très peut nombreux. Les conseils en propriété intellectuelle font plus de cas à la propriété industrielle, car beaucoup plus lucrative (les clients des brevets et marques sont souvent de grandes entreprises si ce n’est des multinationales). Auprès de cabinets de consulting et des avocats, la population d’artistes, n’est pas assez intéressante pour y consacrer une étude sur le copyright au sein de leur service. Généralement les artistes sont réputés des sans-le-sous, et pour cause ?
    2ème précision à propos des textes régissant le droit d’auteur : C’est une contradiction de dire qu’ils sont inexistants. Et puis c’est préjudiciable à l’image de marque de la Tunisie. Historiquement, on est quand même le premier pays arabe à avoir organisé la propriété intellectuelle dans ses deux volets. Certains pays arabes et africains sont encore loin derrière.

    Plutôt, en droit tunisien, il n’existe pas de textes juridiques sui generis (spécifique) à propos de la photographie et ce, contrairement à certains pays qui y ont consacré des lois entières ( ex : Italie). Le régime juridique de la photographe fait partie en premier lieu du cadre général du droit d’auteur. Mais en plus, il y a divers domaines du droit qui entrent en ligne de compte quand on fait de la photographie (droit des technologies de l’information et de la communication, droit des obligations et des contrats, …).
    Si on ne prend en compte que le domaine de droit d’auteur, force est de constater que dans la loi de 1994, telle que complétée et modifiée en 2009, le terme photographie n’est mentionné une seule foi , précisément dans l’article 1er : « Le droit d'auteur couvre toute œuvre originale littéraire scientifique ou artistique quelqu'en soit la valeur, la destination, le mode ou la forme d'expression, ainsi que sur le titre de l'œuvre. Il s'exerce aussi bien sur l'œuvre dans sa forme originale que sur la forme dérivée de l'orignal. Parmi les œuvres concernées par le droit d'auteur :….] alinéa 4 [ les œuvres photographiques auxquelles sont assimilées, aux fins de la présente loi, les œuvres exprimées par un procédé analogue à la photographie ». De plus, les textes juridiques concernant la propriété littéraire et artistique sont épars et ce, contrairement à d’autres domaines où ils sont regroupés dans un code (ex : code du patrimoine). D’où la difficulté d’accès à l’information juridique à propos de la photographie. Un comble quand « nul n’est censé ignorer la loi ». Là il est possible de dire qu’un encadrement juridique clair et précis de la photographie en tant qu’Art, profession, ou pratique amateur est vraiment insuffisant, voir inexistant en droit tunisien.

    Voilà, deux petites rectifications qui s’imposent afin que l’information publiée soit pertinente.

    Emna LAJNEF

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3 comments

  1. la protection des droits d'auteur, c'est à double tranchant : qui de nous ne souhaite écouter/télécharger gratuitement de la musique, des films... ???

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  2. Belle surprise, bravo et merci pour tout Atef
    By the way, la photo de l'article est la tienne?

    Je pense qu'on dit enregistrer l'œuvre non pas la déposer (je vais vérifier)

    Pour la signature, je ne suis pas pour, car tt d'abord ça perturbe l'œil, on ne pourra pas voir la photo comme elle est et puis le fait de la signer me semble quelque part que c est injuste à l égard de la minorité qui respecte le droit d auteur

    Je n ai pas décidé de ne plus partager mes photos sur les réseaux sociaux mais plutôt j ai décidé de ne plus partager toutes mes photos sur ces réseaux

    Un grand merci Atef ;) une autre fois

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  3. @siwar: ‎Siwar Horchani, la photo n'est évidemment pas de moi, mais par contre je l'ai spécifiquement prise dans une banque de photos spécifiant la mention ''libre de droit''! donc je suis totalement verni, :p

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